Starring Liz Taylor (25/03/2011)

SÉLECTION CRITIQUE

Starring Liz Taylor

Le 24 mars 2011 à 19h00    -    Mis à jour le 25 mars 2011 à 9h45

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Elizabeth Taylor
cinéma américain

LE FIL CINÉMA - Elle a commencé le métier d'actrice à l'âge de 10 ans, mais ce n'est vraiment qu'en 1966, à 34 ans, qu'Elizabeth Taylor fut enfin reconnue comme une grande comédienne, avec “Qui a peur de Virginia Woolf ?”. Sélection, en textes et en images, de ses meilleurs films.

4 réactions

La Chatte sur un toit brûlant
(Cat on a hot tin roof)

Film américain de Richard Brooks (1958)
Avec Paul Newman; Elizabeth Taylor; Burl Ives; Jack Carson

Tennessee Williams était fou de rage lorsque, sur le tournage d'Un tramway nommé Désir, la censure avait refusé que Vivien Leigh avoue avoir poussé son jeune mari au suicide parce qu'il était homosexuel. La censure sévira encore, et pour les mêmes raisons, ici. L'intrigue en est quelque peu affadie, même si Paul Newman, avec un beau courage pour l'époque, interprète volontairement Brick comme une icône homo. Dans ce règlement de comptes familial, Richard Brooks, pas forcément subtil mais toujours efficace, a essayé – et, par moments, réussi – à opposer Newman, objet sexy abîmé (il s'est cassé une jambe) à Elizabeth Taylor, femme dans toute sa plénitude charnelle, constamment repoussée et néanmoins triomphante. Le couple embrase le film.
Soudain l’été dernier
(Suddenly, last summer)

Film américain de Joseph L. Mankiewicz (1959)
Avec Elisabeth Taylor; Montgomery Clift; Katharine Hepburn

Le poète Sebastian, pleuré par sa mère, est mort dans des circonstances mystérieuses. Avec l'aide d'un psychiatre, Catherine, sa cousine, va parvenir à se rappeler l'atrocité de ce qui s'est passé « soudain, l'été dernier ». Gore Vidal et Mankiewicz ont amplifié le propos de la pièce en un acte. Et élargi le décor : on passe d'une serre très inquiétante à un hôpital psychiatrique carrément terrifiant. Les difficultés rencontrées par Mankiewicz avec Montgomery Clift et, surtout, Katharine Hepburn n'affaiblissent en rien la force du film. Sa complicité avec le réalisateur permit, en revanche, à Elizabeth Taylor de réussir l'interprétation de sa vie. Son long récit hypnotique, ponctué de flash-back qui occupent une partie de l'écran, reste, aujourd'hui encore, un étonnant morceau de bravoure. Surprise : la censure accepta ce scénario sur l'impuissance, l'homosexualité, l'inceste et l'anthropophagie. Certaines copies subirent, néanmoins, des coupes. Motif : un dialogue trop cru.
Cléopâtre
(Cleopatra)

Film américain de Joseph L. Mankiewicz (1963)
Avec Elizabeth Taylor; Rex Harrison; Richard Burton; Roddy McDowall; Martin Landau

Le film des paradoxes : le plus gros succès commercial de Mankiewicz, dans l'absolu, mais son plus gros échec en terme de rentabilité (budget colossal, vu les retards). Une œuvre personnelle, pleine de fulgurances et de beautés, mais dont le cinéaste refusa, jusqu'à sa mort, de prononcer le titre, tant sa réalisation avait été éprouvante. Bataille d'égos, scandale des amours Taylor-Burton, assiégés par les journalistes. On se souvient de la réplique excédée de Mankiewicz, lors d'une conférence de presse : « Leur liaison est une couverture. En fait, c'est M. Burton et moi qui sommes amants ! » De toutes les superproductions antiques tournées dans les années 50 et 60, Cléopâtre est, avec Spartacus, de Kubrick , la plus intelligente et la plus somptueuse. Du moins dans sa version dite longue, car toutes les variantes existent entre celle de trois heures exploitée à l'époque et la récente restauration du film, qui inclut des scènes retournées par Mankiewicz, sous la contrainte. Magnifique partition d'Alex North et photo de Leon Shamroy.

Le Chevalier des sables
(The Sandpiper)
Film américain de Vincente Minnelli (1965)
Avec Elizabeth Taylor; Richard Burton; Eva Marie Saint; Charles Bronson

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Laura, peintre désenchantée, s'installe à Big Sur, au bord de l'océan Pacifique. Son fils fréquente un collège dirigé par un pasteur marié, soudain amoureux de Laura. Liaison qui éloigne les deux amants de la société (toujours hostile, chez Minnelli), mais leur permet, paradoxalement, de vaincre leur propre isolement. Lui prendra conscience de la faiblesse de l'être humain. Elle, de sa beauté (le visage d'un enfant remplacera, sur ses toiles, le « chevalier des sables », cet oiseau qu'elle peignait sans fin). Quelques thèmes à la mode dans les années 60 – donc démodés –, quelques improbables beatniks (dont Charles Bronson !) ne parviennent pas à faire oublier la splendeur de la mise en scène et de la photographie (Milton Krasner), l'élégante et obsédante musique (The Shadow of your smile, succès mondial de Johnny Mandel). La couleur rouge domine : couchers de soleil, feux sauvages sur la plage et robes d'Elizabeth Taylor, inoubliable en créature aussi tourmentée qu'une déferlante du Pacifique, peignant devant son chevalet, chevelure au vent au bord de l'océan...
Qui a peur de Virginia Woolf ?
(Who's afraid of Virgina Woolf ?)
Film américain de Mike Nichols (1966)
Avec Elizabeth Taylor; Richard Burton; George Segal; Sandy Dennis

Mieux que le souvenir qu'on en avait. L'interprétation tonitruante d'Elizabeth Taylor (Oscar) et celle, magnifiquement retenue, de Richard Burton (pas d'Oscar) sont appuyées par une mise en scène très soignée, très discrète et très tendre. Trente-cinq ans après, le côté psychanalytique (enfant imaginaire, enfant non désiré) de la pièce d'Edward Albee a cédé la place à une peinture au vitriol de l'Amérique. Le jeune couple est le plus terrible : elle (Sandy Dennis), souris grise aux hanches étroites, déjà alcoolique, déjà frustrée ; lui (George Segal), petit coq ambitieux, prêt au pire pour réussir. Les autres, les vieux, Martha et George, sont des victimes, depuis longtemps foutues et donc forcément bouleversantes. Surtout lorsqu'on les voit tenter de survivre à coups de fureur et de dérision. Superbe photo d’Haskell Wexler.

La Mégère apprivoisée
(The Taming of the shrew)
Film britannico-italien de Franco Zeffirelli (1966)
Avec Richard Burton; Elizabeth Taylor; Michael Hordern; Cyril Cusack; Michael York

Le meilleur Zeffirelli. La violence de la pièce de Shakespeare se perd un peu – dans la seconde partie, surtout – dans la préciosité chère au réalisateur. Mais les costumes (Irene Sharaff et Danilo Donati) et la lumière (Oswald Morris et Luciano Trasatti) sont vraiment magnifiques. Et puis Burton et Taylor, qui, à l'époque, semblaient choisir leurs films rien que pour pouvoir s'engueuler devant et derrière la caméra, sont épatants. Notamment lors de la scène du mariage : à la question du prêtre « Voulez-vous prendre pour époux... ? », etc., Taylor, toute souriante et gentille répond : « I will... » Et c'est alors que Burton l'embrasse fougueusement, avant qu'elle n'ait eu le temps de hurler le « not » qui allait suivre. A voir en VO, évidemment.

Reflets dans un œil d’or
(Reflections in a golden eye)

Film américain de John Huston (1967)
Avec Elizabeth Taylor; Marlon Brando; Robert Foster; Julie Harris; Brian Keith

Un œil d'or, mais d'abord un miroir. Quelque part en Géorgie, dans un fort militaire, trois personnages se découvrent à travers le regard de l'autre. Et s'y voient dénudés. Le capitaine Brando et ses pulsions homosexuelles, son épouse Liz Taylor et ses frustrations, l'amant de celle-ci, et son imbécillité paranoïaque. Le regard, l'autre, c'est le soldat qui chevauche, nu, un cheval nommé Firebird et, voyeur innocent, contemple, la nuit, la femme de son capitaine, endormie. Groupe d'êtres humains, allant du fétichisme à l'automutilation, de la caresse au meurtre. Huston a filmé comme un conte oppressant le bref roman, complexe et torturé, de son amie Carson McCullers. Le cinéaste le plus cultivé de Hollywood peint ces égarés en évitant le jugement, le traité de psychanalyse, la caricature. Un rien d'humour macabre souligne le détachement du metteur en scène, contrepoint à sa compassion pour les inadaptés de la vie, pauvres misfits. Audacieux, très calmement subversif, c'est tout un art de l'inexprimé, du non-dit dont on meurt, qui est, ici, porté au sommet.

Cérémonie secrète
(Secret Ceremony)
Film britannique de Joseph Losey (1968)
Avec Elizabeth Taylor; Mia Farrow; Robert Mitchum

Au cimetière londonien où Leonora, prostituée, se rend souvent – sur la tombe de sa fille –, une jeune femme étrange l'observe. C'est Cenci. Nymphomane, on l'apprendra vite, perverse et surtout perdue, elle s'imagine que Leonora est sa mère, qu'on suppose morte et qui, peut-être, ne l'est pas. Transferts, culpabilité : terrain connu. Une incroyable maison 1900 sera le théâtre de leurs affrontements, avec cadavre dans le placard, divan de Freud et cercueil symbolique. Ecrit par un disciple de Brecht spécialiste du macabre grinçant, le dramaturge George Tabori, c'est un épuisant duel de femmes, dévastateur par son humour sombre, sa sauvagerie, sa folie furieuse. Elizabeth Taylor, Mia Farrow, Robert Mitchum s'y détruisent à nu, dépourvus de leur armure de stars, fragiles, désemparés. Une phrase du dialogue donne la clé de ce film longtemps sous-estimé : « Il faut choisir entre le bon goût et la vérité humaine. » Optant bien sûr pour celle-ci, Losey montre quel moraliste il était, exemplaire, impitoyable, sans jamais de repos ni de paix.

Textes tirés du Guide cinéma Télérama

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Le 24 mars 2011 à 19h00    -    Mis à jour le 25 mars 2011 à 9h45

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VOS AVIS (4 COMMENTAIRES)

Koshka849 - le 25/03/2011 à 13h50

Ce n'est pas parce que Tavernier n'a pas apprécié l'interprétation de Liz Taylor dans Qui a peur de Virginia Woolf qu'il a nécessairement raison... J'ai vu ce film pour la première fois hier soir et j'ai été scotchée par le couple Burton/Taylor ainsi que par la violence de l'histoire et des dialogues, un chef d'oeuvre du genre, bien au-dessus de La chatte sur un toit brûlant, en effet. Scènes de la vie conjugale, en comparaison, c'est un conte pour enfants! Magnifique.
Personnellement, je suis contente que la sélection parle du Chevalier des sables, un beau film intimiste imprégné du talent, que dis-je, du génie de Minelli.
8 internautes sur 8 ont trouvé cet avis intéressant.

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chpitt - le 25/03/2011 à 11h30

d'accord et pas d'accord avec les avis précédents: je suis d'accord que l'oubli des premiers films de Taylor est malheureux, effectivement "Ivanhoé" est un chef-d'oeuvre, et les affrontements avec Georges Sanders sont remarquables, notamment le dernier, lorsque Bois-Guilbert est à l'agonie. Sans parler de l'interprétation magistrale que Taylor donne de son amour malheureux pour Ivanhoé. Par contre, je pense que la sélection Cléopâtre & Co est représentative du reste de la carrière de Taylor, et que ce sont tous de bons films, même si le côté Freud, Lacan etc... du film de Losey a vieilli.
Et vive Liz Taylor!
3 internautes sur 3 ont trouvé cet avis intéressant.

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nego - le 25/03/2011 à 08h00

On ne peut pas dire que votre sélection soit très heureuse! D'accord avec l'avis précédent Elisabeth Taylor existait avant 1958.Elle est superbe dans Ivanhoé, par exemple de plus, en revanche les films qu'elle a tourné en héroïne de Tenessee Wylliams sont particulièrement malheureux; la comparaison avec Leigh ou Wood dans Propiété interdite est accablante pour elle. La chatte sur un toit brûlant est un film sans intérêt. Soudain l'été dernier est d'une lourdeur et d'une surchage thématique inssuportable, même si Taylor est excellente à titre personnel. Que dire de Cleopatre, 4 heures pour ressasser une idéee cent fois mieux exprimés dans L'affaire Cicéron ou Eve. De l'avis même de Tavernier sa prestation dans Qui a peur de Virginia Wood est inssuportable de surchage et d'hystérie. Lyz Taylor préféra être une star plutôt qu'une actrice. Elle incarne splendidement un certain âge d'or d'Hollywood. Dont acte, sur le plan professionnel son rayonnement est infiniment moindre que celui d'une Kate Hepburn par exemple. Quand aux références obligés aux cinéastes dit intellectuel de Losey à John Huston, c'est un travers bien français. Non vraiment un hommage bien malheureux!
14 internautes sur 37 ont trouvé cet avis intéressant.

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cricribxl - le 24/03/2011 à 21h15

Incroyables omissions tout de même, E. Taylor a tourné dans quelques grands films avant 1958!!!
Dont "Une place au soleil" de George Stevens en 1951, qui est tout simplement l'un des plus bouleversants chef-d'oeuvre du cinéma américain!
33 internautes sur 39 ont trouvé cet avis intéressant.

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