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28/03/2012

Jeremy RIFKIN : notre futur après le pic de la mondialisation

Nous avons à nouveau un futur

de InternetActu.net de Hubert Guillaud

La Troisième révolution industrielle de Jeremy RifkinLe prospectiviste Jeremy Rifkin (Wikipédia, @jeremyrifkin), directeur de la Fondation des tendances économiques est un penseur important de notre modernité. Nombre de ses livres se sont révélés prophétiques comme La fin du travail (1996) ou L’âge de l’accès (2000). Son dernier livre, la Troisième révolution industrielle (voir également le site dédié), est certainement l’un de ses plus ambitieux, car il nous livre – rien de moins – qu’un futur de rechange par rapport à celui qu’on abandonne.

La seconde révolution industrielle (1880-2006) n’est plus notre futur

Rifkin dresse un double constat.

  1. D’une part, celui de la fin de la seconde révolution industrielle, fondée sur le pétrole et les énergies fossiles. Plus que le pic pétrolier, nous avons atteint “le pic de la mondialisation”, estime-t-il. Nous ne pouvons plus fonder notre croissance sur un système qui va générer par définition des crises à mesure que les énergies fossiles vont se raréfier. Même la perspective de trouver de nouveaux secteurs d’extractions ne suffira pas à combler notre appétit insatiable d’énergie. Pour lui, “la crise c’est le pétrole !” et les conséquences organisationnelles que notre pétrodépendance a eues sur la société tout entière. “Les régimes énergétiques déterminent la nature des civilisations – leur façon de s’organiser, de répartir les fruits de l’activité économique et des échanges, d’exercer le pouvoir politique et de structurer les relations sociales.”
  2. L’autre constat repose bien sûr sur les conséquences dramatiques qu’a engendrées cette seconde révolution industrielle sur la santé de notre biosphère. Les pages qu’égraine Rifkin sur le sujet ressemblent aux constats alarmants et déprimants qu’on retrouve dans tous les livres d’écologistes atterrés. “Depuis 450 millions d’années, la Terre a connu cinq vagues d’extinction biologique. Après chacun de ces coups d’éponge, il a fallu environ dix millions d’années pour retrouver la biodiversité perdue.”

Rifkin tient un propos véhément. Il faut arrêter de tergiverser et prendre acte que nous ne pouvons plus faire reposer la croissance, le progrès, notre avenir sur les énergies fossiles. Il faut clore la parenthèse prédatrice de la seconde révolution industrielle et nous engager dans une autre voie, celle de la “Troisième révolution industrielle” comme il l’a baptisé. Notre avenir doit changer de perspective et pour l’idéaliste constructif américain, cette nouvelle perspective doit nous montrer un futur accessible à tous. “Il devient de plus en plus clair qu’il nous faut une nouvelle logique économique capable de nous faire entrer dans un futur plus équitable et plus durable.”

Sunset at Petroleum Field
Image : Coucher de soleil sur un champ pétrolier, photographié par Fábio Pinheiro.

Notre futur, c’est d’appliquer le modèle distribué de l’internet à l’énergie – et à la société tout entière

“Nous sommes aujourd’hui à la veille d’une nouvelle convergence entre technologie des communications et régime énergétique. La jonction de la communication par Internet et des énergies renouvelables engendre une troisième révolution industrielle. Au XXIe siècle, des centaines de millions d’êtres humains vont produire leur propre énergie verte dans leurs maisons, leurs bureaux et leurs usines et la partager entre eux sur des réseaux intelligents d’électricité distribuée, exactement comme ils créent aujourd’hui leur propre information et la partagent sur Internet.
Rifkin s’appuie sur sa connaissance des caractéristiques de la révolution des nouvelles technos et sur celle des énergies renouvelables pour nous proposer un nouveau défi : celui de l’énergie distribuée. Le partage entre les gens d’une énergie distribuée dans un espace commun ouvert aura des conséquences encore plus vastes [que celles du partage de l'information].”

Pour Rifkin, la stratégie pour y parvenir est assez simple. Le plan de bataille repose sur 5 grands principes :

  1. Le passage aux énergies renouvelables : nous n’avons pas le choix, l’épuisement des énergies fossiles nous conduit à terme à devoir faire entièrement reposer notre économie sur les énergies renouvelables (dont il exclut le nucléaire, qu’il considère comme trop dangereux et trop centralisé et qui, rappelons-le, pour l’instant ne produit que 6 % de l’énergie mondiale avec 440 centrales de par le monde).
  2. La transformation du parc immobilier de tous les continents en ensemble de microcentrales énergétiques qui collectent sur site des énergies renouvelables ; c’est-à-dire passer d’une production d’énergie centralisée à une production totalement distribuée, que se soit en utilisant des éoliennes personnelles, le biogaz, le solaire voir même l’action de la force humaine, comme le montre notamment les plans stratégiques établis par ses équipes pour quatre villes européennes afin de les accompagner dans cette évolution. Le modèle énergétique que combat Rifkin n’est pas tant celui des énergies fossiles, que le modèle centralisé qui en découle. En insistant sur une stratégie de production d’électricité distribuée et diversifiée, Rifkin prône un autre modèle d’organisation économique qui fonde la nature même de sa stratégie.
  3. Le déploiement de la technologie de l’hydrogène et d’autres techniques de stockage dans chaque immeuble et dans l’ensemble de l’infrastructure, pour stocker les énergies intermittentes. C’est certainement à ce jour l’un des points faibles du modèle proposé par Rifkin : notre incapacité à stocker l’électricité doit devenir un enjeu de recherche majeur, explique l’économiste, qui avait déjà consacré un livre en 2002 à ce sujet L’économie hydrogène.
  4. L’utilisation de la technologie d’internet pour transformer le réseau électrique de tous les continents en inter-réseau de partage de l’énergie fonctionnant exactement comme internet (quand des millions d’immeubles produisent localement, sur site, une petite quantité d’énergie, ils peuvent vendre leurs excédents au réseau et partager de l’électricité avec leurs voisins continentaux). Rifkin critique ici vivement la stratégie des acteurs de l’électricité, qui imaginent trop souvent un réseau intelligent du futur centralisé, plutôt que distribué. C’est l’inverse que nous devons faire, explique le prospectiviste. L’énergie distribuée permettrait notamment de nous faire faire un bond en avant dans le taux d’efficacité de production et de transmission électrique, qui demeure très bas depuis les années 60. Une grande part de l’énergie que nous produisons étant dépensée durant son acheminement même.
  5. Le changement de moyens de transport par le passage aux véhicules électriques branchables ou à pile à combustible, capables d’acheter et de vendre de l’électricité sur un réseau électrique interactif continental intelligent.

Cette transition, selon Rifkin, porte en elle l’opportunité d’un nouveau développement économique.

Limites et critiques

Bien sûr, les critiques ne manqueront pas de se déchaîner contre cette vision parfois un peu rapide, pas si simple à organiser ou qui paraîtront à beaucoup irréaliste. On connaît les débats, dont il est difficile de démêler les arguments, sur la possibilité ou l’impossibilité de remplacer notre production électrique actuelle par des alternatives renouvelables, sur nos difficultés à stocker de l’énergie, sur les limites d’un futur des transports tout électrique

Aux chiffres avancés par Rifkin, d’autres avanceront d’autres chiffres. Bien sûr. Les décroissants le taxeront de croissantiste (ce qu’il reconnaît être). Les tenants du nucléaire et du pétrole, d’affabulateur (“Ces dernières années, les grands groupes pétroliers ont largement consacré leurs efforts à un seul objectif : semer le doute et le scepticisme dans l’opinion publique sur le changement climatique. Dans la brève période 2009-2010, les secteurs du pétrole, du charbon et de la distribution d’électricité ont dépensé 500 millions de dollars en lobbyisme pour empêcher le vote d’une législation sur le réchauffement de la planète.”).

Le modèle de l’internet distribué et coopératif qu’il tente d’appliquer à l’énergie et au fonctionnement économique tout entier n’est pas lui-même aussi distribué et coopératif qu’il le dessine. A ce jour, l’internet demeure une innovation largement récupérée par la centralisation et la compétition, qui porte, dans son infrastructure même, un modèle bien peu efficace énergétiquement.

Mais l’essentiel n’est certainement pas là en fait.

Malgré toutes les critiques qu’on peut faire à ce plan, Rifkin propose un récit puissant, capable de raconter l’histoire d’une nouvelle révolution économique et d’expliquer comment toutes ces initiatives technologiques et commerciales apparemment aléatoires pourraient s’inscrire dans un vaste plan stratégique. Rifkin propose bien un plan de développement économique qui fera naître des milliers d’entreprises distribuées et pas seulement un plan de dépenses publiques. Il propose un avenir, quand les crises actuelles (économiques, écologiques, sociales…) et les perspectives d’avenir de notre économie fossile n’en proposent plus aucun, autre qu’une crise qui s’annonce plus grave encore que celle que l’on connaît. La force de Rifkin est de proposer une vision, là où les autres n’en ont plus, là où la crise les détruit toutes. Et c’est en cela que la perspective qu’il dessine est stimulante : il nous propose un avenir, un avenir où les écosystèmes doivent succéder au marché, où la distribution et la coopération doivent supplanter la centralisation et la compétition. Comment peut-on ne pas désirer y adhérer ?

La collaboration plutôt que la compétition, la cocréation plutôt que le caporalisme

Pour Rifkin, notre avenir repose sur la coopération et la cocréation. Et c’est cette vision-là, trop rapidement esquissée dans le livre, que nous pouvons avoir envie de développer. Rifkin nous invite à faire de l’innovation sociale partout, à développer la participation effective de chacun à cet avenir. A refuser la centralisation.

Il repousse ainsi les projets de réseaux intelligents centralisés, comme le développent les grands acteurs de l’électricité – mais sa critique pourrait certainement s’étendre aux projets du même type que l’on peut avoir pour l’avenir de la ville, des transports, etc.

Notre avenir repose sur des réseaux intelligents distribués. L’électricité ne doit pas aller du producteur aux consommateurs, mais de tous à chacun, comme les mailles d’un réseau pair à pair.

Solar Flower
Image : Une fleur solaire, un robot solaire photographié dans les environs de Rio par Trey Ratcliff.

La relation antagonique entre vendeurs et acheteurs cède la place à une relation coopérative entre fournisseurs et usagers. L’intérêt personnel est subsumé par l’intérêt commun. La propriété intellectuelle de l’information est éclipsée par un nouvel accent sur l’ouverture et la confiance collective. Si l’on préfère aujourd’hui la transparence au secret, c’est pour une raison simple : quand on accroît la valeur du réseau, on ne s’appauvrit pas personnellement ; on enrichit tout le monde, car les acquis de tous sont des nœuds égaux dans l’effort commun. (…) Par conséquent, l’accès aux vastes réseaux mondiaux devient une valeur aussi importante que les droits de propriété privée aux XIXe et XXe siècles.

Cela n’est pas sans conséquence, bien sûr. Nous avons à réaffirmer le rôle de nouveaux biens communs, insiste Rifkin. Nos idées sur la propriété sont si indissociables des notions traditionnelles de possession et d’exclusion qu’on a du mal à imaginer qu’il existait un droit de propriété plus ancien dont les gens ont joui pendant des siècles : le droit d’accéder à une propriété détenue en commun – par exemple celui de naviguer sur un fleuve, de fourrager dans une forêt locale, de marcher sur un sentier de campagne, de pêcher dans un cours d’eau voisin et de se réunir sur la place publique. Cette idée plus ancienne de la propriété comme droit d’accès et d’inclusion a été progressivement marginalisée à l’époque moderne, où les relations de marché ont dominé la vie et où la propriété privée a été définie comme « la mesure de l’homme ». (…) Lorsqu’une grande partie de la vie économique et sociale se déroule dans des communaux en source ouverte, la propriété intellectuelle devient, à toutes fins pratiques, une convention démodée qui ne sert à rien.

C’est notre modèle de société que nous devons changer

Au-delà de la transition économique et énergétique qu’il propose, le propos de Rifkin est éminemment politique. Pour lui, il nous faut réformer nos structures et nos modes de pensée. Ce n’est pas tant un défi économique que nous devons réussir, qu’une transition civilisationnelle. Nous devons passer d’une société centralisée à une société collaborative. Changer de régime énergétique suppose de changer la structure même de l’organisation politique et sociale de nos sociétés.

Sans le dire aussi clairement (ce sera peut-être le sujet de son prochain livre ?), Rifkin distille l’idée qu’il nous faut changer les formes de représentation et de participation des citoyens. A le lire, on a plutôt envie de nourrir la vision que nous propose Rifkin, en exemples stimulants qui reposent sur la coopération et la cocréation de notre futur, plutôt que sur le fait d’attendre des solutions venues d’en haut.

Le plus grand défi de la vision de Rifkin, n’est pas que la société ne la partage pas, n’est pas de ne pas obtenir un large consensus sur les objectifs et les finalités de sa vision, mais que nos représentants politiques et économiques ne cessent de s’en défendre au nom de leurs intérêts. Et c’est finalement ce qu’il raconte en évoquant, longuement, ses discussions avec les grands de ce monde et ses difficultés à convaincre certains de nos gouvernants de changer de modèle. Or passer de la centralité qui leur profite à une répartition plus “latérale”, déportée, acentrée… est une perspective qui n’enchante pas tous les dirigeants de ce monde, tant s’en faut. Comme il le souligne longuement : “ceux qui se sont nourris au robinet de l’énergie fossile” sont prédisposés à fonctionner de manière centralisée. Si l’ère industrielle mettait l’accent sur les valeurs de discipline et de travail acharné, l’autorité hiérarchique, l’importance du capital financier, les mécanismes du marché et les rapports de propriété privée, l’ère coopérative privilégie le jeu créatif, l’interactivité pair-à-pair, le capital social, la participation à des communaux ouverts et l’accès à des réseaux mondiaux.” Autant dire qu’il y a un monde pour passer de l’un à l’autre.

D’ailleurs, ce qui surprendra certainement le plus un lecteur français de ce livre, c’est l’absence de nos représentants politiques et industriels de ce débat. Alors que Rifkin dresse une apologie de l’Europe, le seul français évoqué dans les 300 pages de l’essai de Rifkin est Claude Lenglet, qui était directeur de recherche pour les programmes européens de Bouygues immobilier, et qui a visiblement depuis quitté la société. Où sont les dirigeants d’EDF ? De Renault ? De Total ? De France Télécom ? … Où sont les hommes politiques français ? Au contraire des Allemands, aucun n’était représenté aux tours de tables des grands de ce monde qu’évoque Rifkin. Aucun n’a adhéré à la Troisième révolution industrielle proposée par Rifkin. Pourquoi ?

Comme il le dit lui-même, très sobrement, dans une interview au Figaro : La France est un pays centralisé. Cet atout du passé se retourne contre elle au moment d’aborder la troisième révolution industrielle : il lui faut passer au modèle collaboratif nécessaire pour réussir la transition. L’Allemagne est beaucoup mieux outillée : c’est un pays décentralisé, une fédération de régions. Ce serait paradoxal que la France, qui a créé l’échelle pertinente pour la troisième révolution industrielle, à savoir l’Union européenne, échoue. Mais un basculement de la réflexion politique est nécessaire.”

Une évolution d’autant plus difficile si on regarde de plus près le “côté burlesque dans l’infâme système du « tourniquet », où cadres supérieurs des entreprises privées de l’énergie et hauts fonctionnaires de l’État changent de chapeau et de bureau dans une sorte de tourbillon”, ironise Rifkin. L’avenir n’est plus tant à la compétition, au caporalisme d’Etat qu’à la collaboration et à la cocréation. Il y défend une “”, c’est-à-dire une société où le pouvoir est partagé entre tous ses membres et pas au seulement au profit de quelques-uns.

Bien sûr, Rifkin va peut-être un peu loin quand il évoque, un peu béatement, l’empathie (qui était le thème de son précédent livre Une nouvelle conscience pour un monde en crise). Il a quelques envolées lyriques un peu faciles sur l’amour que nous avons à nous porter les uns les autres. Comme si d’un coup la société latérale allait tous nous jeter dans les bras les uns des autres dans un vaste élan de générosité désintéressée.

La lutte entre les vieux intérêts du pouvoir hiérarchique de la deuxième révolution industrielle et les intérêts naissants du pouvoir latéral de la troisième crée un nouveau clivage politique, reflet des forces rivales qui se disputent la maîtrise de l’économie. Un nouveau récit s’écrit sous nos yeux, et, lorsque nous pénétrerons plus avant dans l’ère nouvelle, il va refondre l’idée même que nous nous faisons de la politique”, avance le prospectiviste en opposant “les personnes et institutions qui pensent en termes de hiérarchie, de barrières et de propriété, et celles qui pensent en termes de latéralité, de transparence et d’ouverture.”

La pensée organisationnelle et hiérarchique n’est pas adaptée à la transformation nécessaire. C’est pour cela qu’elle échoue depuis plusieurs années à apporter des solutions aux crises que nous vivons et à celles qui s’annoncent.

Cela signifie que ce futur, c’est à nous tous de le défendre, de le porter. Sortir d’une position de consommateur et de spectateur de la politique, pour aller vers une position d’acteur. Et Rifkin a raison, l’internet nous en donne certainement les moyens, mais il ne se suffit pas.

Nous avons à nouveau un futur, mais, à en voir les déclarations des candidats a l’élection présidentielle, personne pour le défendre. Personne, parce que ce futur remet en cause la raison même de leur candidature. Ce futur ne cherche pas tant un président figure tutélaire du fonctionnement hiérarchique de notre société, qu’une organisation plus latérale, où toute action publique serait enfin plus partagée, pour être mieux portée et plus acceptée par la société tout entière. Rifkin nous redonne bel et bien un futur, mais un futur qui, comme tous les futurs, nécessite une révolution des mentalités pour devenir un projet de société.

Hubert Guillaud

écologie, économie, énergie, innovation sociale, politique, politiques publiques, prospective

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29/02/2012

Télérama : La société de renseignement Stratfor, nouvelle cible de WikiLeaks

Le 27 février 2012    -    Mis à jour le 28 février 2012 à 9h54

Le site de Julian Assange dévoile les méthodes peu scrupuleuses de Stratfor, une des plus influentes sociétés américaines de renseignements.

photo : alamosbasement licence Flickr Creative Commons

La concomitance de temps est troublante, sinon ironique. Moins d’une semaine après l’inculpation formelle de Bradley Manning –  le soldat américain soupçonné d'avoir transmis à WikiLeaks des mémos diplomatiques – le site de Julian Assange a entamé le 27 février la publication de cinq millions de courriels de la société de renseignement américaine Stratfor.

Baptisés « Global Intelligence Files », ces échanges électroniques prouveraient les liens quasi-incestueux qu’entretient l’entreprise avec ses clients privés ou gouvernementaux, et couvrent une période qui s’étend de 2004 à 2011.

« Les emails de Stratfor montrent leurs réseaux d’informateurs, leurs structures de versement de pots-de-vin, leurs techniques de blanchiment d’argent ou l’utilisation de méthodes psychologiques », écrit l’organisation de Julian Assange dans un communiqué.


Stratfor a été fondée au Texas en 1996 par George Friedman, un analyste américain d’origine hongroise porté sur la géopolitique et la futurologie. Dans les premiers échanges publiés par WikiLeaks, Stratfor ressemble moins à une officine des services de renseignement (le magazine financier Barron’s la considère comme une « CIA de l’ombre ») qu’à un nid d’espions à la petite semaine. On y apprend que le géant des produits chimiques, Dow Chemical, a sollicité Stratfor pour surveiller les Yes Men (les activistes rigolos avaient ridiculisé la multinationale lors du 20e anniversaire de la catastrophe de Bhopal) ; Coca-Cola a requis le même service, pour garder un œil sur les activités de la PETA, la puissante association de défense des animaux.

Retour au hacking
Le principe de Stratfor est simple : vendre du renseignement ouvert saupoudré d’analyse comme une information top secret. Et le vendre très cher.

Owni, seul partenaire français de WikiLeaks pour cette nouvelle fuite, détaille avec précision le modus operandi de l’entreprise. Et les clients sont nombreux à mordre à l’hameçon. On y retrouve même plusieurs médias, du Kyiv Post ukrainien au Global Times chinois en passant par Hurriyet, l’un des plus grands quotidiens turcs.

Baptisés « Confederation Partners », tous ces titres ont souhaité bénéficier de l’« expertise » de Stratfor, malgré ses méthodes pour le moins opaques.

Et maintenant, la question rituelle : d’où WikiLeaks tient-il ces documents? Cette fois-ci, point de taupe à l’horizon, puisqu’il s’agit d’un cadeau des Anonymous. Au moins de décembre, la « section » Antisec du groupe décentralisé d’activistes en ligne avait annoncé avoir mis la main sur les données personnelles de 4 000 abonnés de Stratfor, ainsi que sur 200 gigas de courriels.

Dans ce paysage recomposé autour du hacking, le divorce avec les gros médias semble par ailleurs consommé, ce qui clôt définitivement la parenthèse ultra-médiatique qu'a connu le site entre 2010 et 2011. Exit le New York Times, le Guardian ou Le Monde (Julian Assange est très fâché avec les deux premiers), bonjour Rolling Stone (qui avait publié une longue interview d’Assange en janvier), Nawaat (l’emblème de la révolution tunisienne) ou Dawn (le principal quotidien pakistanais).

En tout, ce ne sont pas moins de 25 organes de presse, tous supports confondus, qui appuient WikiLeaks dans cette nouvelle aventure. Avec une légère contrepartie : faire état des difficultés du site d’Assange, qui après avoir suspendu temporairement ses publications, réclame des dons pour assurer sa « survie financière ».

Olivier Tesquet

Le 27 février 2012    -    Mis à jour le 28 février 2012 à 9h54

VOS AVIS

Breizatao - le 28/02/2012 à 08h30

Bravo Wikileaks, je suis à la lecture du livre de Noami Klein "La stratégie du choc ou le capitalisme du désastre" dont le grand promotteur a été Georges Bush qui a privatisé tous les services de sécurité du pays y compris l' armée... une pure folie et tout ça avec son fameux copain Friedman !
13 internautes sur 13 ont trouvé cet avis intéressant.

beeee - le 27/02/2012 à 20h19

"sur les données personnelles de 4 000 abonnés de Stratfor, ainsi que sur 200 gigas de courriels"
Et ces gentils hackers au grand cœur ont dans la foulée mis la main sur les numéros de carte bancaire des utilisateurs. Et, me dit-on, comme dirait Moati, certains ont essayé de se servir....
4 internautes sur 28 ont trouvé cet avis intéressant.

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26/01/2012

Encore, la droite la plus bête du Monde ?

A l’évidence ! si HOLLANDE est le benêt qu’on nous dit, et que l’UMP n’arrive pas à comprendre son programme …. 

00:51 Publié dans Modernité | Lien permanent | | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | |  Imprimer | |

18/01/2012

Voulez-vous vraiment avoir accès à une information qui soit filtrée et conditionnée selon le bon vouloir d'un gouvernement ?

Journée de solidarité avec le mouvement de blackout mondial sur le Net lancé par les américains pour défendre la liberté sur le Net et lutter contre les lois SOPA et PIPA




INFORMATION sur les LOIS autorisant des censures arbitraires sur Internet

 

HADOPI qui explore toutes les pistes... Aussi bien celle du mouchard sur nos ordinateurs, que celle du filtrage des sites ou encore de l'analyse de packets.

LOPPSI qui permet de mettre dans une liste noire n'importe quel site sans intervention d'un juge. Aucun organisme ne peut contrôler cette liste, ce qui empêche les réclamations.

ARJEL qui permet déjà le blocage de certains sites.

SOPA et PIPA aux États-Unis, qui violent les principes de liberté d'expression et qui coupent les jambes de l'innovation. Ce qui est marrant avec SOPA, c'est que si ça passe, ça nous affectera tous puisque nous utilisons beaucoup de services basés aux États-Unis (hébergement, noms de domaine, DNS...etc). C'est pourquoi cette lutte contre SOPA est importante.

ACTA qui fait la part belle aux brevets et nous posera beaucoup de problèmes dans des domaines aussi variés que la liberté d'expression, la santé ou l'innovation

IPRED et un nouveau projet de filtrage européen qui sont des équivalences de SOPA et PIPA.


Le point commun de toutes ces lois , qu'elles soient déjà en place ou en cours de discussion, c'est tout simplement de permettre à des entreprises privées et des gouvernements de contrôler la liberté d'expression, l'innovation et de s'octroyer un droit à la censure sur à peu près tout et n'importe quoi.

Comment ? Et bien dans un premier temps, en espionnant les communications électroniques des internautes, mais aussi en permettant la censure de n'importe quel site sur des prétextes aussi bancals que la lutte contre la pédo-pornographie ou le téléchargement illégal.

Imaginez que demain, tous les sites doivent appliquer ces "normes". Alors, chacun devra s'auto-censurer car immanquablement des sociétés privées auront pu graissé la patte de politiciens pour que certains sujets ou logiciels ou techniques ou bidouilles soient censurables !

Ceci vaudra pour nous tous et pas seulement les gens qui produisent du contenu sur le Net : Entrepreneurs, webmasters, mais aussi les blogueurs, les journalistes, les activistes et même la Mamie du Cantal (Free) qui se fera peut être couper sa connexion internet parce qu'elle a raconté un truc sur Facebook qui est soumis à la censure gouvernementale.

On peut tout imaginer, puisque ces gens qui seront aux commandes du filtrage d'Internet n'auront pas de garde fou. Un tel pouvoir ne doit pas exister... jamais et pour personne. C'est comme cela qu'a été imaginé Internet à ses débuts et en faire un média contrôlé reviendrait à nous remettre devant la télévision ou le Minitel.

Les sites qui sont en blackout aujourd'hui contre SOPA, PIPA et toutes ces lois sont :

  • Google
  • Reddit
  • Facebook
  • Twitter
  • Wikipedia EN
  • Les sites des Anonymous
  • XDA developers
  • JcFrog
  • GOG
  • Boing Boing
  • Destructoid
  • Avast
  • Tucows
  • Mozilla
  • Mojang (Minecraft)
  • RageMaker
  • Twitpic
  • Identi.ca
  • Red 5 studios
  • Le réseau Cheezburger (I Can Haz Cheezburger, Fail blog, The Daily What, Know your meme...etc)

Liste non exhaustive !

LIENS pour s’informer :

Pourquoi le projet de loi américain SOPA nous menace-t-il tous ?

12 actions pour combattre et stopper SOPA

La Quadrature du net

21:09 Publié dans Modernité | Lien permanent | | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | |  Imprimer | |

24/08/2011

De l’utilité des communautés

Perclus d’autant de défauts que ces “vaches de bourgeois” croqués à merveille par Brassens, je m’efforce malgré tout de ne pas avoir d’œillères et de garder à l’œil une sélection d’un peu plus de 200 blogs de préférence pas trop hystériquement bavards ou conformistes .

Je n’ai pas trop de mérite, les différentes visions et solutions du “prêt à penser” en circulation à un instant donné m’ont toujours passionnées, autant par la richesse des idées et des arguments ou de leur drôlerie, que par les bases de méditations (plus que de réflexion) offertes sur ce qu’il est possible d’en tirer pour l’avenir de nos sociétés.

Par nature, plutôt adepte d’un certain volontarisme en matière de recherche et d’innovation, je me demande comme beaucoup d’entre nous, comment éviter de laisser faire n’importe quoi ?

Et bien sûr, même si je suis conscient du danger que présentent des technostructures démentes, je trouve les idéologies fondées sur le concept de décroissance beaucoup trop incomplètes : l’union de volontés de s’opposer ne suffit pas à définir une volonté générale positive, il faut aussi débroussailler tous les cheminements possibles, y compris les moins conformistes et les plus innovants, et sur ce dernier point on ne peut que constater qu’on nous laisse généralement sur notre faim.

C’est donc avec un intérêt très relatif que j’ai abordé l’article suivant et la longue vidéo (sous-titrée) qui l’accompagne. Le catastrophisme, les peurs qu’on nous sert tous les matins, exacerbent ma méfiance et auraient plutôt tendance à m’exaspérer.

http://www.internationalnews.fr/article-collapse-effondre...


Collapse (Vostfr) 1/2 par Super_Resistence

Collapse (Vostfr) 2/2 par Super_Resistence

http://www.dailymotion.com/video/xkboo7_collapse-vostfr-1-2_news#from=embediframe
http://www.dailymotion.com/video/xkbscp_collapse-vostfr-2...
http://www.youtube.com/watch?v=O71RQT6tbIU&feature=pl...

Je ne sais pas trop ce qui a fait tilt dans mon esprit, mais ça doit être la présentation un peu étrange de cette interview.

  • Les évènements politiques ou économiques rapportés aussi atroces soient-ils, ne sont pas une nouveauté.
  • Le style est très américain, avec parfois une touche de sentimentalisme qui dépasse la touche de compassion habituelle qui fait partie du politiquement correct du bobo américain (par opposition aux touche-bombe du Tea Party et autres frappadingues encore pires)

Paradoxalement, le souffle de cette interview tient selon moi, en 3 points :

  • la grande banalité des choses rapportées mais avec un effort notoire pour leur mise en connexions
  • l’évidence d’une évolution humaine exigée par la raréfaction des énergies fossiles et d’autres contraintes imposées par la Nature, en attendant la relève par des technologies intégrant mieux ces contraintes et exploitant les énergies naturelles.
  • un touche d’humanisme sincère et une simplicité de prises de décisions et d’actions, à la portée de tout un chacun, qui tranchent avec des visions collectives laissant l’individu totalement désemparé ou à la merci du système politico-économique.

Parmi les moyens de survie énoncés, la reconstitution des petites communautés d’exploitations agricoles pour se nourrir en utilisant les ressources locales, à portée de mains, en attendant de remettre une système social plus performant. C’est le Crédo bien connu de tout individu touché par la grâce du développement durable !

Pourtant, aussi évidente que soit cette perspective, je la trouve un peu restrictive. Je pense qu’il y a moyen d’exploiter le concept de Communauté dans un contexte bien plus large et moderne, et que cette idée de fonder le futur de nos sociétés sur une Organisation de Communautés plutôt que de Personnes doit être davantage étudiée car elle peut s’avérer extrêmement féconde et pragmatique.

J’étais jusqu’à présent très embarrassé par tous les soubresauts politiques tournant autour du communautarisme. Je suis maintenant atterré par le manque de réflexion approfondie des hommes politiques sur le sujet des communautés, et leur obsession à se cantonner à une exploitation honteuse du concept pour glaner un maximum de voix aux élections.

Comme tout le monde, sans céder aux sirènes du nationalisme, aux exploitations politiciennes du racisme ni aux dérives populaires je n’ai guère envie de voir mon pays ravagé par des confrontations entre groupes ethniques, religieux, pas plus que mafieux ni de donner davantage corps aux vieux concepts de “lutte des classes”, à celui plus récent de “société multiculturelle” ou plus probable, au “sauve-qui-peut-général” en préparation que même les non-voyants peuvent voir venir, “sauf les aveugles, bien entendu”.

Aujourd’hui, juste après avoir terminé de visionner cette vidéo, je suis tombé par hasard après avoir écouté Umberto Ecco sur l‘émission Je t’aime pareil de France Inter consacrée ce samedi 20 août au “Vivre entre 2 Cultures”. Son écoute m’a réellement convaincu qu’une société organisées en communautés pourrait être le choix le plus pertinent pour notre évolution future.

Si vous écoutez cette émission, vous entendrez des métis qui racontent de l'intérieur ce qu'est une communauté pour leurs parents. Leur point de vue change un peu la donne par rapport à ce qu'on nous rabâche.

On y redécouvre qu'une communauté c'est avant tout un outil qui permet à des individus, tout simplement de vivre; et qu’avant qu’on en arrive à une entité qui cherche à persister au point de s’imposer aux autres par la violence, il faut accumuler longtemps de maladresses .

Il est réjouissant de voir que ce besoin simple de survivre  rejoint le point de vue souligné par Michael Ruppert dans la vidéo ci-dessus. Et que l’analyse de Jeremy RIFKIN sur un besoin d’empathie plus grand pour survivre renforce cette idée de base.

Même si les communautés telles qu’on les perçoit aujourd’hui, ne donnent qu’une pâle idée de ce que pourrait être une organisation de la société fondée sur ce concept, une telle construction pourrait être probablement le choix le plus naturel et le plus performant.

  • non seulement pour passer la période de décroissance de notre consommation en ressources fossiles
  • mais aussi pour maîtriser l’évolution de notre système de décision politico-économico-technique, adoucir les tendances négatives de la concurrence, favoriser les coopérations, et mettre le tout au service de nos capacités à fonctionner comme un auto-système capable d’autocorrection, plutôt que persister avec des machineries impossibles à piloter ou pilotées par des déséquilibrés (dictateurs ou oligarchies obsédées par le pouvoir, aspirant aussi à être non seulement au-dessus des autres mais aussi des lois … )

Les notions de groupe de travail et d’intelligence collective sont nées il y a plus de 10 ans. Toute l’évolution technologique du numérique encourage la constitution de groupe sociaux que ce soit à travers les outils d’entreprise ou que ceux destinés au grand public.

Pour l'instant on est dans le laisser-faire le plus total, pourtant on devra aller plus loin : comme les individus peuvent être amenés en fonction de l'évolution de leurs centres d'intérêt à quitter un groupe pour en rejoindre un autre, qu'ils peuvent aussi faire parti de plusieurs groupes, que certains groupes peuvent avoir la tentation d'abuser de leur puissance, il y a là de nouvelles formes de nomadisme et de rapport entre communauté de travail ou d'autres types, qu'il faudrait bien un jour finir par penser et organiser !

Mais au point départ, ce qui nous fait le plus défaut, maintenant : ce sont des hommes politiques  qui acceptent de penser le concept de communauté pour en tirer une organisation pertinente.

A nous des y obliger ! A nous de réagir, pour ne pas avoir la paresse de suivre ceux qui ne voient dans une communauté qu’un bouc-émissaire ! A nous de méditer sincèrement aux avantages que peut représenter une communauté pour chacun d’entre nous quand l’état providence sera dans les limbes.

A nous de rêver et penser comment avec une société organisée autour de communautés on pourra restaurer une société plus performante et adaptées aux conditions de vie que nous impose dame Nature.

Comme à l'évidence quand on "pense" ces groupes sociaux ou les communautés de travail, on ne les conçoit pas comme statiques, regrettons les échecs systématiques des politiques pour sortir les communautés précaires de leur ornière et le retard pris pour gérer efficacement communauté et mobilité d'un groupe à l'autre.

Exigeons dorénavant, plus de réalisme et de meilleurs résultats, pour que chacun puisse facilement évoluer, je pense qu'il ne s'agit pas d'une question d'argent mais d'une meilleure qualité de services exigeant une réelle volonté de réorganisation axée sur des résultats tangibles.

Le concept de communauté contient une si grande richesse humaine utile à la survie des individus, qu'il serait dommage de le laissé enseveli sous les monceaux de conneries dont on le couvre au quotidien, sans rien faire sauf à en rajouter une couche de temps en temps.

Voici comment à partir de l'hypothèse de départ qu'une Communauté est un instrument utile à la survie de ses membres dans un contexte donné, et leur permettant de créer les conditions d'une meilleur adaptation dans le futur, on pourrait commencer à réfléchir :

1) Quelles sont les meilleures façon de créer et organiser de telles Communautés ?

2) Quelles sont les meilleures façon de gérer les ressources ? Si une Communauté,

  • monopolise des ressources, quels sont les type de relations contractuelles qu'elle doit établir avec l'extérieur ?      Quelles peuvent être les natures de contrats ? avec des personnes, avec d'autres Communautés ?
  • partage des ressources avec des tiers, quels sont les types de partage, de responsabilités qu'il est possible de définir ?   Quelles modalités envisager selon qu'il s'agit de personnes ou de communautés ?

3)  Comment orienter notre organisation, pour que les productions ou les produits de leur dégradation soient réutilisables ou recyclabes ?

4) Quels concepts nouveaux pourrait-on forger, pour qu'une société organisée en communautés puisse s'auto-reconfigurer le plus facilement possibles, de façon à ce que tous ces membres puissent se retrouver en situation de mieux s'adapter à de nouvelles conditions, ou dans le pire des cas sauver un patrimoine maximum ?

Ami lecteur qui a bien voulu me suivre sur ce tracé de chemin à peine ébauché, merci de t’essayer à cheminer à ton tour et d’imaginer ce qu’un tel formalisme peut offrir de mieux pour progresser vers de nouvelles voix, un “verbe” nouveau qui lui nous portera sur de nouvelles voies… Fini de tourner en rond !