Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

31/07/2009

La Tribune 30.07.2009 Bernard STIEGLER "Le consumérisme a atteint sa limite"

http://crisedanslesmedias.hautetfort.com/archive/2009/07/...

http://www.coteboulevard.com/2009/07/le-consum%C3%A9risme...

http://www.latribune.fr/actualites/economie/france/200907...

Dans sa série d'été Visions de l'après-crise,La Tribune a interrogé Bernard Stiegler, philosophe et essayiste. Pour cet auteur prolifique, la crise sonne comme la fin de l'"american way of life" et annonce l'émergence de nouveaux modèles de croissance, comme celui de l'économie contributive.

Comment percevez-vous la crise actuelle ? La crise que nous connaissons aujourd'hui est beaucoup plus grave qu'une crise économique: c'est la crise d'un modèle, celui du consumérisme, qui atteint aujourd'hui ses limites. Il y a donc rupture. Mais c'est une rupture lente dont les premiers signes remontent à 1968 avec le malaise de la première génération de consommateurs. Aujourd'hui, la chute de General Motors démontre ô combien que le monde a changé - et qu'il ne sera plus comme avant.

Quels sont les ressorts de notre modèle qui ont été distendus, voire brisés ? Le consumérisme est une forme de capitalisme née de la rencontre du fordisme avec le keynésianisme de Roosevelt, et qui a donné naissance à l'"american way of life". Contrairement au modèle industriel de la vieille Europe, fondé sur le productivisme, il suppose l'augmentation du pouvoir d'achat des salariés pour les inciter à consommer. C'est le triomphe du marketing: vendre n'importe quoi à n'importe qui. Ce modèle qui détourne tous les désirs du consommateur vers les objets de consommation se développe tout d'abord de manière heureuse - c'est le plein emploi - mais il se transforme rapidement, comme l'avait prédit Herbert Marcuse, en machine à détruire la libido. Alors règne la consommation addictive fondée sur la satisfaction immédiate des pulsions. Le résultat est que la société de consommation ne devient plus productrice de désirs mais de dépendances. C'est un modèle dangereux: le consommateur y devient malheureux comme peut l'être le toxicomane qui dépend de ce qu'il consomme mais déteste ce dont il dépend. D'où une frustration grandissante et des comportements qui inquiètent comme la destruction de la structure familiale, la peur des adultes à l'égard de leurs propres enfants ou une déprime généralisée.

D'autres facteurs peuvent-ils expliquer cette défiance ? Il s'est effectivement passé beaucoup de choses depuis les années 1970. Le fameux rapport Meadows en 1972, qui avançait la thèse de la non-soutenabilité de notre société de consommation au-delà du XXIe siècle, prend aujourd'hui singulièrement du poids. La révolution conservatrice et la mondialisation ont également changé la nature, non du capitalisme, mais des capitalistes eux-mêmes. L'entrepreneur s'efface au profit du manager soumis à un capitalisme financier ultra-spéculatif qui n'investit plus dans la durée. Cela se traduit par une pression considérable sur les salaires et la création d'artefacts, dont les subprimes ne sont qu'un exemple, pour compenser la baisse du pouvoir d'achat et perpétuer ainsi, de façon artificielle, le modèle consumériste. C'est la convergence de toutes ces tendances lourdes qui expliquent la crise: un capitalisme, auquel les gens ne croient plus, ne peut plus durer.

Un nouveau capitalisme peut-il émerger de cette crise ? Selon moi, ce qui est en train de disparaître, c'est un monde où il existe d'un côté des producteurs et de l'autre, des consommateurs. D'autres modèles commencent à se développer avec la révolution numérique. Sur Internet, il n'y a ni des producteurs ni des consommateurs mais des contributeurs. On entre dans la nouvelle logique de l'économie contributive, qui repose sur des investissements personnels et collectifs et qui crée une autre forme de valeur. Les exemples ne manquent pas, du logiciel libre à Wikipédia. Une récente étude de l'Union européenne pronostique que près d'un tiers de l'activité dans l'économie numérique fonctionnera sur un tel modèle d'ici trois ans. Mais il ne concerne pas uniquement l'informatique, il peut également se décliner dans l'énergie, avec les modèles décentralisés, la distribution alimentaire ou la mode...

Mais n'est-ce pas simplement un nouveau discours visant à préserver un statu quo ? Ce discours exprime une pensée au service d'un combat. Car, à l'heure où tout s'écroule, tout est fait pour empêcher le vieux monde et des vieux acteurs de disparaître. Toute la classe politique défend la consommation même si elle sait bien que cela ne peut pas durer. On essaye de sauver la télévision, qui n'a pas vu venir le numérique, ou les constructeurs automobiles, qui misaient hier encore sur la surpuissance de leurs moteurs ! Mais les choses avancent. Barack Obama a réussi à faire admettre que le modèle américain était révolu et des puissances émergentes comme la Chine savent bien qu'elles ne peuvent pas suivre le modèle occidental d'hyperconsommation, sous peine de faire exploser la planète.

La mutation de nos économies est donc inéluctable... Le pire des scénarios serait de promouvoir un consumérisme "new look" et peint en vert. Les nouvelles tensions apparaîtraient très vite dans un monde aux ressources finies et le risque de conflits majeurs serait alors extrêmement élevé. C'est pourquoi les États doivent s'engager à accompagner la mutation de nos économies, à promouvoir les externalités positives. Mais toute activité ne peut être monétisable: il faudra imaginer une nouvelle fiscalité, développer de nouveaux indicateurs, inventer de nouvelles formes de rémunération. Bref, bâtir un modèle de vraie croissance contre la mécroissance qu'est le consumérisme. Bio Express: Philosophe de formation, élève de Jacques Derrida, Bernard Stiegler est un auteur prolifique avec une quinzaine de livres, dont "Réenchanter le monde" et le dernier, "Pour en finir avec la mécroissance", en collaboration avec Ars Industrialis (www.arsindustrialis.org). Parallèlement, il dirige le département culturel du Centre Georges-Pompidou après avoir exercé des hautes responsabilités à l'INA et à l'Ircam.

Propos recueillis par Éric Benhamou

Commentaire Miguel Texeira (coteboulevard.com)

Je trouve la vision de Bernard Stiegier intéressante pour plusieurs aspects :

Je pense comme lui que nous sortons de la société de l'hyper consommation : celle des hypermarchés symboles de l'abondance et du bonheur moderne, celle des autoroutes toujours plus nombreuses permettant de partir en week end sur la côte d'Azur et de manger des tomates cultivées sous serre au sud de l'Espagne, celle de la télévision qui vous dit quels doivent être vos désirs et ce que vous devez penser, celle de la "voiture reine" qui doit absolument envahir la ville, quitte à détruire la qualité de vie et.. le patrimoine historique que l'on sacrifie pour leur permettre d'arriver jusqu'aux abords des magasins de vêtements.

La vision de Bernard Stiegier d'une économie contributive met en lumière des éléments vus ailleurs :

  • les nouveaux modes de production de l'information : wikipedia qu'il cite mais aussi les essais de jounaux citoyens par exemple
  • de nouvelles manières de vendre : dans le marketing "2.0" par exemple, le client devient aussi celui qui, par sa préconisation, va participer à la campagne marketing d'un produit (quel blogueur n'a pas écrit un post sur un article qu'il est tout content d'avoir acheté, quel facebooker n'a pas partagé son enthousiasme pour une cause, quel internaute n'a pas transmis par mail une vidéo qui vente un produit mais qu'il juge amusante ?)
  • de nouveaux modes de production : de plus en plus de particuliers installent eux-même des éoliennes et revendent l'électricité qu'ils produisent à EDF qui se charge ensuite de la distribuer au plus grand-nombre

Je note avec plaisir qu'il fait la différence entre ce qu'on pourrait appeler une "nouvelle consommation" et un "consumérisme peint en vert" : il ne sert à rien de prendre sa bagnole pour acheter chez carrefour un veau Bio élevé à 600 km, il faut changer vraiment nos modes de production et de consommation.

Je ne suis pas certain que la vision décrite par Bernard Stiegier remplace à terme le modèle classique qui a pourtant atteint ses limites et dont un nombre croissant de personne ne veut plus. Il m'apparait pourtant clairement qu'une part croissante de l'économie changera pour s'en approcher. dans Société |

Commentaires de le note coteboulevard.com.

"Je ne suis pas certain que la vision décrite par Bernard Stiegier remplace à terme le modèle classique qui a pourtant atteint ses limites et dont un nombre croissant de personne ne veut plus. Il m'apparait pourtant clairement qu'une part croissante de l'économie changera pour s'en approcher."

Oui, les choses changent, les habitudes se modifient. Mais qu'est ce qui change au fond? Le sens de la propriété (qui est, semble-t-il, une des bases du capitalisme)? Il me semble qu'il reste bien enraciné dans les mentalités?

Alors, qu'est-ce qui change? A l'origine, le constat (les gens ne veulent plus de l'hyper consommuérisme), il y a une déception: la marchandise est sensée répondre (combler) aux désirs, mais elle est aussi source d'insatisfation.

Un nouveau capitalisme? Pourquoi pas...

Rédigé par: Eric | 30 juillet 2009 at 15:21

Commentaires Crise dans les Médias (qui cite la parie en italique gras)

Privilégier la quantité à la qualité, des appareils électro-ménagers moins fiables ou qui ont une durée de vie plus courte que ce qui pouvait être conçu auparavant... (malgré l'accroissement de consignes sécuritaire), l'argent-roi en arrière plan (qe dis-je ? au premier plan !), voilà ce que je pense grossièrement du consumérisme. Sociologiquement, des personnes déçues (peut-être déprimées) de ne pas avoir les moyens de remplacer une télé par une autre plus belle parce que plus récente..., des personnes jamais comblées et donc la satisfaction n'est jamais assouvie (donc peut-être déprimées effectivement...), des enfants sur-équipés technologiquement et dont les parents semblent impuissants à combler leurs désirs toujours grandissant, etc. etc.
Sinistre vision, mais il y a peut-être un peu de vrai... :)

Ecrit par : Vidi | 31 juillet 2009

Depuis que le produit n'est plus à la hauteur de la pub, comme les promesses de la science, la bulle de consommation - écart entre la valeur côtée des actions (ce que suscite le nom du produit) et leur valeur réelle (ce qu'obtient le consommateur lorsqu'il consomme le produit) est de plus en plus grand.
C'est le principe du film pornographique.
Quand la bulle va-t-elle crever ?

Vais-je crever avant ?

Ecrit par : Le bateleur | 31 juillet 2009

Les clairvoyances de Bernard Stiegler m'ont toujours impressionné de justesse. Malheureusement, j'ai l'impression qu'on le prend, en raison de ces clairvoyances, pour un "Bouffon sage",ou "Sage bouffon", je ne sais pas: La pertinence de son propos, la précision de sa description des mécanismes en jeu nous convainquent toujours; on sait que la mécanique suit exactement ces dynamiques.
On sait que oui, sa comparaison du consumérisme avec n'importe quel autre toxicomanie est juste.

Bien sûr, ce n'est pas exactement ce qu'il dit. J'intérprète l'extrait qu'en a fait Eric Mainville sur son blog, en posant la question La fin du consumérisme?

Le mieux, c'est que je le cite :

Ce modèle qui détourne tous les désirs du consommateur vers les objets de consommation se développe tout d'abord de manière heureuse - c'est le plein emploi - mais il se transforme rapidement, comme l'avait prédit Herbert Marcuse, en machine à détruire la libido. Alors règne la consommation addictive fondée sur la satisfaction immédiate des pulsions.

Le résultat est que la société de consommation ne devient plus productrice de désirs mais de dépendances. C'est un modèle dangereux: le consommateur y devient malheureux comme peut l'être le toxicomane qui dépend de ce qu'il consomme mais déteste ce dont il dépend.

D'où une frustration grandissante et des comportements qui inquiètent comme la destruction de la structure familiale, la peur des adultes à l'égard de leurs propres enfants ou une déprime généralisée.


Notre société de consommation ne produit plus de désirs, seulement de la dépendance.
Nous avons atteint un "niveau de vie", un "train de vie", un "niveau d'envie que l'on est en mesure d'assouvir", appelons ça un "niveau social" tel que désormais nous ne consommons plus pour satisfaire nos envies, mais pour ne pas tomber dans un état de sevrage de la drogue qu'est devenu pour nous l'Objet De Consommation.

Je veux consommer!
Je veux consommer!
Je veux, je veux, je dois!
Je DOIS consommer!

Ce n'est plus un choix, un acte d'analyse et de volonté personnelle.C'est désormais un besoin impérieux.
Un besoin nécessaire au confort du démoniaque organisme parasital que le modèle consumériste a nourri en notre sein.Ce parasite consumériste qui nous consume pour pouvoir vivre.
Qui ne s'émeut pas des dégâts collatéraux que sa subsistance implique: "destruction de la structure familiale", "peur des adultes à l'égard de leurs propres enfants", "déprime généralisée".
Qui, désormais, s'exprime dans la noirceur la plus éclatante.

Alors, non. Le consumérisme n'est pas en train d'atteindre ses limites. Nous avons atteint un point avancé de dégradation intellectuelle: nous avons "plongé". L'Objet De Consommation nous a eu.
On pensait dominer les choses, malgré les dires de sombres devins égarés dans les méandres corticaux de leurs délires.
Ces gens-là nous prévenaient :

Prenez garde!
Si vous ne prenez pas garde, vous ne serez plus maître de vos actes. Vous agirez pour nourrir cette bête immonde qui vit en vous. Votre volonté sera aliénée à ses seuls souhaits.

Ils avaient raison, les cons.

Mais, il n'est pas trop tard, si l'on décide de se sortir les doigts du cul, d'accepter notre condition de drogué(e)s
Et d'entamer le plus rapidement possible une cure de désintoxication.

Donc, non.

Non, le consumérisme n'est pas en train d'atteindre ses limites.
Nous avons atteint les limites, du n'importe quoi.

Il suffisait juste qu'on nous le dise, et Bernard Stiegler vient de nous le dire. Pas directement, non. Il ne parle pas de nous, de moi. Il parle de Nous, "le consommateur", "la société de consommation", "la famille", "les adultes", "les enfants", "la déprime".

Posons-nous tous, et toute, donc cette question: Est-ce que j'ai oui, ou non, une addiction à l'Objet De Consommation?
Posons-nous cette question, sincèrement. Ne nous contentons pas de réponses qui nous sont soufflés par l'Objet De Consommation.

Les gens en général, oui, ils sont drogués. Mais, pas moi. Parce que moi, je suis un peu à l'écart des circuits tradictionnels de la conso. Je ne recherche pas le bling-blong, je recherche l'authenticité, l'équité. C'est pour cela que j'essaie de réparer avant de jeter et de racheter. C'est pour cela que je ne consomme pas des produits dont l'élaboration a généré des souffrances pour les bêtes, ou pour l'environnement, ou pour le péquin de l'autre bout de la terre. C'est pour cela que je consomme que du "bio", euh non que de l'"équitable", ergh nan, que de l'"écolo", enfin que des trucs bien, quoi. Enfin, quand je peux. Parce que j'y pense, et puis, des fois, j'oublie.


On ne dit pas à un drogué qui s'enfonce dans son addiction :

Hé, toi! La drogue que tu prends, là, elle est en train d'atteindre ses limites. Des fois que tu ne saurais pas. Et, une fois qu'elle aura vraiment atteint ses limites, bein,là...Crac. Boum. Hue.


On lui pose des questions, plutôt:

Cette drogue que tu prends, vois-tu ce qu'elle te fait dire, te fait faire, et même te fait penser?
Vois-tu la souffrance que tu engendres chez ceux qui sont trop faibles, et trop peu protégés pour avoir le droit de vivre selon leur volonté?

Ecrit par : Zackatoustra | 31 juillet 2009

@^vidi,

oui, cet accent mis sur la quantité au dépens de la qualité, c'est ce qui produit, justement une baisse générale de la qualité. CQFD.


@le bateleur,

Oui, le marketing a un rôle central dans cet état de faits.

@Zakatoustra,

"Alors, non. Le consumérisme n'est pas en train d'atteindre ses limites. Nous avons atteint un point avancé de dégradation intellectuelle: nous avons "plongé". "

Oui, ça n'est pas faux. Cza n'est pas loin d'être ce que je pense, car, concrètement, on ne voit pas le consumérisme disparaitre: il est toujours bien vivace.
En revanche, une certaine forme de consumérisme va sans doute disparaître. Peut-être va-t-on devenir un peu plus raisonnable, et un peu p^lus heureux?

Ecrit par : Eric | 31 juillet 2009

16:36 Publié dans Société et Justice | Lien permanent | | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | |  Imprimer | |

POLE EMPLOI - Actualisation Demandeur d’Emploi, pauvre France !

Quand on se rappelle qu’un certain SARKOZY a voulu la fusion de l’ASSEDIC et de l’ANPE, qu’on a supprimé les moyens d’actualisation par courrier pour les remplacer par un robot téléphonique, facturé, et par un site Internet qui ne marche qu’épisodiquement pendant les quelques jours où on peut saisir l’actualisation de sa position de demandeur d’emploi (connexion impossible ou réessayez !), il n’est pas étonnant d’avoir 2 idées qui reviennent de façon lancinantes :

- Si en étant président de la République, donc en ayant la haute main sur l’administration, on n’est pas capable d’arriver à de meilleurs résultats avec le Pole Emploi après plus de 6 mois d’existence,  alors il me semble difficile de croire que ce même personnage va pouvoir réussir des réformes un peu plus difficiles avec des sujets encore moins à sa main !

- Que penser aussi de la façon dont l’exploitation de ce site Internet a été sous-traitée pour qu’il parte dans les choux à la moindre montée en charge des actualisations ? Si on estime qu’il y a  1 million d’actualisations à saisir en 5 jours,  en faisant l’hypothèse que les saisies d’un jour se concentrent uniformément sur 5 heures de pointe, il faudrait pour éviter des files d’attente interminables que le système soit capable au niveau national de traiter en pointe simultanément de 10 à 15 demandes par seconde, au moins. Ce ne sont pas là des ressources difficiles à monopoliser. Notre soit disant hyper président rajouterait-il à son incapacité à réussir sa réforme, un comportement calculateur et malhonnête qui trouverait dans ce manque incroyable de ressources un moyen facile pour décourager des milliers de demandeurs d’emploi ?

Si en matière de pilotage, ça casse pas des briques,  ça pourrait quand même, par finir par péter loin !

02:31 | Lien permanent | | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | |  Imprimer | |

01/07/2009

Il Silenzio de Nini Rosso par Melissa Venema, 13 ans.

16:03 Publié dans Chanson, Danse, Musique, Vidéo | Lien permanent | | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | |  Imprimer | |

14/06/2009

Métaphore du jour

"Le néolibéralisme c'est comme construire des autoroutes à péage pour y circuler sans permis et sans limitation de vitesse."

Christian FAURÉ in "INTERNET ? Circulez y a rien à voir"

 

02:13 Publié dans Société et Justice | Lien permanent | | Tags : neoliberalisme | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | |  Imprimer | |

08/06/2009

Télérama 8/6 - La société civile peut-elle porter un projet planétaire ?


RÉINVENTER…
LE POLITIQUE

Le 8 juin 2009 à 14h00

Tags : spécial innovation politique débat

LE MONDE BOUGE - Dominique Reynié, professeur à Sciences-Po, voit dans la dynamique collective un salut possible pour l'humanité.


- Illustration : Laurent Bazart

Une Fondation pour l'innovation politique ? C'est l'UMP qui en a eu l'idée. Créé en 2004 par Jérôme Monod, conseiller de Jacques Chirac, ce think tank est aujourd'hui indépendant. Son nouveau directeur général, Dominique Reynié, professeur à l'Institut politique de Paris, spécialiste des transformations politiques et des études d'opinion, entend élargir son champ d'études : le politique, dit-il, ne peut se concevoir sans y intégrer les mutations technologiques, sociales, environnementales.

Quelles sont les ambitions de la Fondation pour l'innovation politique ?
Beaucoup de choses se recomposent actuellement, et si l'on n'essaie pas d'appréhender de façon philosophique, politique, juridique, sociale, ces phénomènes nouveaux, on risque de se laisser dominer par les innovations technologiques qui ont aussi leurs propres logiques. On se retrouverait dans des sociétés qui seraient le résultat de ces innovations sans que ces dernières aient été pensées. Nous avons resserré nos études sur la société civile européenne, la société émergente en France et l'enregistrement des comportements sociaux inédits. Ce qui nous intéresse, c'est la condition commune et le fait qu'il y ait ici ou là des expériences significatives. Qu'elles soient encourageantes ou inquiétantes.

“La taxe Tobin, cette idée d'un impôt planétaire
pour financer la justice ou le développement,
est un exemple parfait d'innovation politique.”

Qui sont les nouveaux acteurs que vous voulez identifier ?
Nous nous intéressons à la façon dont une société civile est en mesure ou pas de déterminer un ordre politique. Il nous faut donc identifier ce qui déroge à la tradition, au choix historique français (depuis la Révolution) d'instituer une société à partir de l'Etat. La société civile a sa propre dynamique, et sa part d'autonomie est en train de produire quelque chose que l'Etat n'avait pas prévu, y compris à l'échelle de l'Europe. Il y a en Europe une densité sociale qu'on ne soupçonne pas quand on l'observe simplement au niveau de l'Union et des institutions de régulation communautaire, ces machines assez froides et élitistes qui composent un Meccano complexe. La sociabilité européenne s'invente à toute vitesse et engendre quelque chose à quoi les organisations politiques n'avaient pas songé.

La crise économique a-t-elle produit de nouvelles analyses, des façons novatrices de penser la politique ?
Malgré les dramatiques conséquences qu'elle engendre, cette crise a des effets bénéfiques : un dégel s'amorce. Ça a un côté catastrophique, car les repères s'effondrent, mais, d'une certaine façon, l'histoire nous rend service. La crise contribue à accélérer les processus, ce qui nous permettra, collectivement, de nous adapter plus vite que nous ne le ferions sans elle. Les pays qui avaient historiquement inventé la règle économique, et qui en ont eu le monopole, sont aujourd'hui désemparés de voir que tout le monde s'y est mis. Si l'on prend l'exemple des délocalisations, c'est un drame évident, parce que les emplois partent. La redistribution de la richesse au plan planétaire est donc un drame pour nous. Mais simultanément, des centaines de milliers de personnes dans le monde sont sorties de l'extrême pauvreté. La croissance est à un tournant : ou elle nous propulsera vers la catastrophe écologique, ou elle sera fondée sur des principes totalement différents de ceux d'hier et d'aujourd'hui. Elle peut recréer le monde.

Une croissance innovante ?
Oui. Il faut peut-être croire la Chine quand elle affirme qu'avant trente ans elle mettra en circulation des voitures qui ne pollueront pas du tout, parce qu'elle ne pourra pas avoir des voitures comme celles d'aujourd'hui. On peut se rééquiper entièrement, avec de nouvelles règles environnementales, de nouveaux matériaux. On va souffrir, car il faut défaire ce qui existe et le recomposer différemment. L'Occident n'aura plus le rôle qu'il a joué dans l'histoire.

“La gauche reste rivée à l'idée d'un humanisme
impossible sans l'Etat. C'est un grand ratage...”

D'un point de vue politique, il n'y a pas vraiment d'innovation : cela ne se traduit souvent que par la création de nouveaux partis nés des anciens...
Je suis frappé de voir à quel point une bonne partie de la gauche n'a pas compris l'époque. Quand on regarde son parcours historique, elle a développé la théorie très cohérente d'une société sans Etat et d'un individu émancipé. Or, aujourd'hui, son discours dominant est le suivant : s'il n'y a pas l'Etat, on est morts, et il faut faire attention à l'individualisation de la société. Il semble qu'un verrou l'empêche de penser la justice sociale en s'appuyant sur la société civile avec ce que celle-ci peut créer comme richesses et représenter comme système de solidarité. La France est extrêmement active dans le domaine de l'engagement associatif. Or la gauche reste rivée à l'idée d'un humanisme impossible sans l'Etat. C'est un grand ratage... La gauche suédoise, elle, a privatisé la fonction publique. Et a redéfini les statuts privé/public en permettant de passer de l'un à l'autre. Le discours centré sur l'Etat risque d'aboutir, au niveau européen, à une volonté de réappropriation de la nation dans laquelle l'Etat garderait sa dimension traditionnelle. La notion d'altermondialisme, ce n'est pas la gauche traditionnelle qui l'a pensée. La taxe Tobin, cette idée d'un impôt planétaire pour financer la justice ou le développement, est un exemple parfait d'innovation politique. Je suis convaincu que c'est une idée pertinente, venue de milieux plutôt minoritaires. Mais elle n'a pas été relayée par les partis institutionnels. Dans une période récente, Bill Clinton, Tony Blair, Gerhard Schröder et Lionel Jospin étaient au pouvoir ensemble, et il ne s'est rien passé.

Selon vous, la droite a-t-elle eu un discours plus novateur ?
Je ne pense pas que la droite ait la maîtrise de ces concepts. Mais par tradition, par culture, elle est plus à l'aise avec le monde de l'entreprise.

Cela a toujours été le cas...
Oui, mais, du coup, elle est plus en prise avec ce qui palpite dans la société. Du moins, une partie de la droite, et à certains moments. Ce qui n'empêche pas les déficits publics d'augmenter quand elle gouverne. Elle aussi a beaucoup recours à la gestion par l'Etat.

La véritable innovation résiderait-elle dans une nouvelle utopie ?
Je me méfie du mot « utopie » en politique. Dans son livre La Fin de l'histoire et le dernier homme, paru au seuil des années 1990 en France, Francis Fukuyama développait la thèse selon laquelle nous sommes arrivés à un moment où nous ne sommes plus en mesure de définir un horizon désiré, préférable à la situation d'aujourd'hui. Le problème c'est de déterminer, à l'échelle de la planète, le modèle que l'on peut se donner comme horizon, qui soit différent de celui que nous avons aujourd'hui. La grande innovation serait de conceptualiser un nouvel horizon.

“L’élection d’Obama prouve que l'on est
dans un monde où l'on peut encore inventer,
avec des valeurs qui nous sont chères.”

La victoire de Barack Obama à la présidence du pays le plus puissant du monde n'est-elle pas en mesure de dessiner un nouvel horizon ?
C'est la première belle histoire planétaire depuis la globalisation. Obama parvient à convaincre que l'on ne va pas nécessairement vers des lendemains terribles. Et son élection prouve que l'on est dans un monde où l'on peut encore inventer, avec des valeurs qui nous sont chères. Il a la possibilité de peser sur l'histoire, pari aussi passionnant que le développement de l'économie durable, qui est un enjeu lié à la conscience planétaire. Personne ne pourra rien faire dans son coin contre le réchauffement climatique : ce sera planétaire ou rien. La question est de savoir si l'on en est capable collectivement.

Les élections européennes risquent de mettre encore une fois en évidence le peu d'enthousiasme qu'elles inspirent. Comment innover pour y remédier ?
Les Européens sont très attachés à l'Europe, contrairement à ce que pourrait laisser penser l'euroscepticisme latent. Ils ne sont pas forcément attachés à l'idéal fédéraliste, mais la globalisation les européanise. Et les grands défis, comme la santé, les responsabilisent en tant qu'Européens. Alors, ou il y a une réponse à ces véritables demandes européennes, avec la construction d'une vraie puissance publique, ou on laissera passer la chance. Et alors les sirènes nationalistes se feront entendre. .

Adresse internet : www.fondapol.org

Propos recueillis par Gilles Heuré
Télérama n° 3099

15:00 Publié dans Modernité | Lien permanent | | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | |  Imprimer | |